Chaosphere

Dimanche 11 avril 2010 à 13:54

Year after year out on the road
It's great to be here to see you all
I know, for me it is like
Coming home

[ Coming Home - Scorpions ]

Il y a des choses que l'on oublie, et quand on les redécouvre, on en pleurerait presque de joie.

Laisser la plume du stylo sur le papier, sans chercher à faire bien, simplement en cherchant à faire. Et alors se dessine le portrait de celui qui m'avait échappé tant de temps depuis que j'ai commencé Doppelganger. Et alors le Danseur Noir émerge, enfin, sous les couleurs des crayons, lui que je n'arrivais pas à attraper. Les ailes sanglantes d'Ulrich naissent sous la pointe du stylo. 

Tant de temps perdu à ne plus respirer.
Tant de temps perdu à étouffer en se débattant, en cherchant sans trouver.
Tant de temps perdu à se chercher en se perdant.

Et enfin, la paix. Sereine. L'écriture retrouvée, le dessin qui s'élance au bout du crayon, et le sourire qui ne s'efface pas, apaisé, enfin, et non plus rongé par le stress de ne plus savoir comment faire, choisir, évoluer, apprendre, être. Parce qu'il n'y a pas à se poser la question. La réponse vient à soi quand enfin, on se pose et on arrête de réfléchir. Quand enfin on fait ce qu'on a toujours voulu faire.

Je n'ai pas trouvé de travail ? Et ? J'en profite maintenant pour faire ce qui me permet de me retrouver réellement.

Pas de recherches. Pas de grandes questions existencielles.
Parce qu'il suffit parfois juste d'être pour retrouver son équilibre et se rendre compte qu'on compte pour certaines personnes - qu'on n'est pas seulement le parasite, la chose qui ronge. Et on essaye d'appliquer à nouveau ce qu'il faut pour vivre sereinement. C'est parfois si simple, de se retrouver. Tellement que parfois, cela nous échappe...

Samedi 20 mars 2010 à 10:38

                         Never seen such doubt
                         Never seen without
                         Forever seemed so right
                         Understand I try
                         { Praise Lamented Shade - Paradise Lost }

   Des jeux qui passent de mains, qui se changent et s'échangent. J'ai en permanence une dizaine de jeux de tarots et oracles, et ce nom ne risque pas de décroitre, bien entendu, mais l'avantage du troc c'est que je peux faire passer des jeux qui ne parlent pas, qui ne me parlent plus, à d'autres, contre de nouveaux jeux, c'est bien l'avantage. Je récupères l'Arcus Arcanum d'Aradia en lui envoyant mon Tarot des Druides, bien inutilisé, posé sur mon étagère. J'aime quand les choses passent à d'autres. C'est bien fait pour ça, les dons et les trocs.

   Reste qu'en ce moment, je dois trouver du boulot et c'est pas fol, comme situation. J'ai du déposer plus d'une vingtaine de CV (j'ai perdu le compte) dans des restaurants. Demain, je vais en déposer à l'UGC et aux autres cinés comme m'a conseillé Eric. De toute façon, faut que je le trouve, ce boulot. Je veux pas rentrer. Pas que j'ai pas envie d'éviter mes parents mais ... En faite, j'ai surtout pas envie de voir ma mère. Je me rends compte à quel point notre relation est à un point de non-retour désespérant depuis plusieurs années. Je n'ai que 18 ans, pourtant. Mais je suis incapable de parler avec elle. Je n'ai pas confiance en elle, elle n'a plus confiance en moi depuis longtemps. Mes relations avec ma famille sont assez déglinguées, je dois avouer, et j'ai pas tellement fait d'efforts pour améliorer ça. J'arrive bien à communiquer avec mon père, on est à peu près sur la même longueur d'ondes : tu veux le garder pour toi, tu le gardes pour toi, tu veux en parler, je t'écoutes. On a juste du mal à savoir quand il faut rire ou non, parfois. Ma mère, par contre ... Toujours à vouloir tout savoir. Je rigoles jaune en me rappelant le nombre de fois où elle m'a demandé "mais Wilwarin, c'est ta petite amie ... ?", insistant à chaque fois que je lui répondais "mais non maman -_-". Bon, la situation devient un peu plus ironique maintenant, je dois avouer ... Ou les disputes quand je lui disais pourquoi je pleurais parfois dans ma chambre (un livre, un passage d'écriture) et qu'elle insistait pour que je "dise la vérité" ... Relation déglinguée où le mensonge est vérité et la vérité mensonge. Quelle étrange chose. Et je ne parlerais pas des relations avec ma soeur qui sont une catastrophe assez navrante.

   Et quand je regarde autour de moi, quand je regarde les gens dont je me suis sentie proche d'instinct, je me rends compte que ces relations de famille déglinguées sont courantes chez mes amis, ceux dont je me sens vraiment proche. Des relations borderlines : on ne les hait pas. Mais on n'arrive pas à vivre avec eux. On les aime sans pouvoir s'empêcher d'être incapable de les supporter. Parce qu'on n'est pas tout à fait comme eux. Parce qu'on a des points de vue qui dérapent, qui déraillent par rapport au leur. Je trouve ça fascinant, d'ailleurs, de voir à quel point quelques petits détails font que les relations familiales déraillent complètement. Pas au point d'être catastrophique. Mais juste entre la frontière, à un point d'équilibre, près à tomber du côté de "bonne relation" et de celui de "catastrophe en tous genres".

   Finalement, qu'y a-t-il à observer là-dedans ? Je ne sais pas trop ; je sais simplement qu'il faut que j'y fasse attention. C'est comme ça, je ne m'arracherais pas de ma famille car elle est mon sang et ma chair : les liens sont puissants, tout comme la hamingja. Mais mes choix m'éloigneront ou me rapprocheront d'eux. Les chemins s'ouvrent : à moi de choisir désormais.

Dimanche 7 mars 2010 à 16:27

Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron,
Modulant tour à tour sur la lyre d'Orphée,
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée ...

El Desdichado. Nerval. A chaque fois que je récite ce poème, que ce soit par coeur ou avec le texte sur les yeux, sur l'écran blafard d'un ordinateur ou sur du papier jauni, j'ai l'impression qu'une autre voix se mêle à la mienne, me contant ses malheurs et ses espoirs, son renouveau dans ces mots si simples qui ont frappé tant de coeurs.Il y a beaucoup à apprendre de ces mots, pour moi, en tout cas. Comme le disait Cantos, tout en m'étranglant : "Tu verras, ce n'est pas douloureux. La mort avant la mort, la colère suprême, la vérité révélée." J'ai rarement de mots doux de sa part, ai-je à le préciser ?

Mais voilà. En ce moment, je traverse un Achéron personnel. Se lever et rester debout face à tous ceux qui me disent de me rasseoir et de continuer comme ça n'est pas simple. Quand le huit de coupes est sorti lors de ce tirage, ce n'est pas le ton de l'ange mutilé que j'ai senti, mais plutôt celui du Serpent. Celui qui m'a dit de ne pas m'empoisonner plus. S'aveugler et se perdre ne sert à rien. Lève-toi ! Elève toi ! Et que ta voix se fasse entendre par delà ton esprit ! Seule ta rébellion peut être entendue.

Alors autant faire comme Kain. Se poser un instant, fermer les yeux, blotti contre le radiateur d'un wagon usé jusqu'à la rouille, et savoir qu'on arrivera bien quelque part, maintenant que le mouvement est lancé et que l'on ne peut plus rien contre lui.

Cela faisait tout de même bien longtemps qu'un tirage ne m'était pas venu aussi facilement que celui-ci. Un matin, le sommeil encore ancré dans les yeux, glauque. Se saisir de son jeu de tarot, le Mage, pas un autre, battre les cartes, en silence, pour ne pas réveiller celle qui dort encore, les étaler, sans un mot. Se saisir d'un bloc note, écrire, à toute vitesse, le plus rapidement possible, aussi rapidement que la main le permet, laisser les idées défiler au fur et à mesure que les cartes se dévoilent aux yeux fatigués, au corps stressé.

Il n'y a rien de plus magique que ces instants de temps suspendu, où l'on ne sait pas où les cartes vont nous mener, mais où leur sens s'élève de la plus pure des manières aux yeux épuisés d'un sommeil fatigant et rongé par l'angoisse.

Vendredi 12 février 2010 à 12:36

                                Happiness (is a warm gun)
                                Bang Bang Shoot Shoot
                                Happiness (is a warm gun, momma)
                                Bang Bang Shoot Shoot
                                { Happiness is a warm gun - The Beatles }

   Je me retrouve devant le clavier à me demander pourquoi j'ai envie d'écrire, au final, pourquoi je me retrouves là. La journée a commencé simplement pourtant. Un peu tard - les réveils tardifs, ça me connait -, et avec un nouveau livre à ajouter à ma bibliothèque. Qu'est-ce qui fait que je me retrouves à me poser ce genre de questions, au final ? Quand je vois le nombre de personne qui s'inscrivent sur Yunasdestiny, je me demande "mais qu'est-ce qui fait qu'on se retrouve tous là, au final ? Qu'est-ce qui fait qu'on s'intéresse à tout cela ?".

   Bien entendu, je me suis souvenu des mots d'Isis 0. Je ne sais pas où, je ne sais pas quand, mais ce sont les mots, le plus important : "on vient tous dans l'ésotérisme à cause d'une blessure originelle." Le propos est généralisant, bien entendu, mais pour moi, il a pris beaucoup de sens. Quand je jette un coup d'oeil en arrière, en effet, je me rends compte à quel point ceci est vrai pour moi. Il n'y a pas de traumatisme ; mais il y a une fêlure originelle qui est bien présente et que je désire compenser, que je désire colmater, pour pouvoir enfin passer à autre chose. Peut-être une autre fêlure qui sera elle-même à soigner, qu'il faudra moi-même recoudre avec soin, pour encore pouvoir avancer, passer à une autre blessure, et ainsi de suite. Je ne suis peut-être qu'une longue suite de fêlure, qui sait ? Mais j'en reviens à ce que je disais un peu plus haut.

   Une fêlure originelle. Celle à partir de qui tout est parti. Qui fait que je suis entrée dans l'ésotérisme. Au fond, je crois qu'il y en a deux qui ont fait que. La toute première ? Cet affreux manque de confiance en moi, toujours pas tellement réglé (comme je disais à quelqu'un, qui se reconnaitra peut-être si elle passe ici, "je me fais peur". Ce genre d'affirmation est terrible quand elle est vraie. Et il y a des moments où, en effet, je me fais peur, que ce soit pendant les (très rares, encore heureux) crises de rage ou pendant certains évènements où je déplace, modifie les choses, sans savoir si j'ai une réelle prise sur ce que je fais). C'est étrange à quel point un manque de confiance peut vous faire plonger dans une chose ou l'autre. Certains se dirigeront vers la peinture, la drogue, la lecture, que sais-je d'autre encore. Moi, je me suis dirigée vers les cartes. C'est quand mon manque de confiance à atteint son plus haut stade, au moment où je n'arrivais plus à différencier la vérité du mensonge, que je me suis achetée mon premier oracle. Que je n'ai plus. On aime tous notre premier jeu, mais celui-ci fut mon premier jeu choisit sur le coup de la difficulté. Alors que j'ai toujours celui que je considère comme mon vrai premier jeu, mon premier tarot. Reste que je suis entrée dans le monde du tarot à cause de ce manque de confiance qui me rongeait. Qui me ronge toujours, même si cela s'améliore, malgré mon embarras et ma timidité. (oui, on dirait pas, comme ça, quand je suis lancée, mais les premiers pas sont affreusement difficiles pour moi ^^').

   La deuxième ? Je crois que c'est simplement la solitude humaine. La timidité, le silence sont des choses qui m'ont baillonnée pendant des années. Et au fond, quoi de plus rassurant que leur présence ? Même si leurs leçons sont dures parfois, même si la baffe peut être terriblement douloureuse (Hel ne m'a que rarement épargnée dans mes moments de mollusquerie dépressive aiguë u_u et ça fait mal de se prendre Ses leçons dans la tête ... mais c'est un mal qui est un sacrifice. Qui au final m'a toujours allégée.), même si certains ne peuvent pas s'empêcher d'avoir des mots ironiques ou moqueurs, je suis d'abord venue à leur rencontre, pour ceux que je nomme parfois les chimères, parce que j'étais seule. Parce que j'avais besoin de poser des mots là où je n'arrivais pas à les dire. Et ils ont été là pour moi, comme j'ai pu être là pour eux. Quant aux Dieux, la rencontre s'est faite elle aussi dans la solitude et la douleur, mais elle continue, elle aussi, dans la joie et le bonheur. 

   Il y a toujours une blessure originelle, nous disait Isis 0. C'est terrible à quel point cela peut être vrai chez moi. Mais ce qu'il faut, c'est que cette blessure ne nous amène pas à la mutiler plus et davantage. Les rencontres que j'ai faites, les choix qui se sont faits à cause de ces blessures m'ont aidées, après, à améliorer ce qui était la cause de tout cela. Et si je suis ici, maintenant, toujours avec ce jeu de cartes, ce paquet de destin, ces chimères aux murmures indomptables, et si je me dévoue tant aux dieux, c'est bien à cause de toutes ces failles.

   Au fond, c'est aussi peut-être pourquoi Temoan, Aëgnare et Ser reviennent me hanter de leurs murmures obsédant. Car ils sont Blessures et Fêlures Originelles qui se sont battues pour pouvoir devenir autre, pour dépasser leur fêlure et à nouveau, vivre.

http://chaosphere.cowblog.fr/images/XVTheDevilbytwistedsense.jpg
Parce qu'au fond, il y a un Lien, au fond de nous, que nous nous sommes imposés. 
Pour ne plus écouter nos voix, pour ne plus écouter nos cris, pour devenir sourds et mourir.
Pour que le silence soit fait sur nos douleurs et nos besoins, pour que le silence règne sur nos pulsions.
Mais il y aura toujours un Diable ricanant pour nous rappeler qu'au fond,
Tout au fond,
Nous sommes Pulsions de Vie, nous sommes Pulsions de Mort.
Même si je suis loin d'avoir explorée toutes les leçons de cette carte, et que je me fais toujours peur.
 

Artwork : XV - The Devil par twisted-sense

Dimanche 7 février 2010 à 14:14

                                We are the lost
                                The ones forgotten
                                And this time
                                The future is ours
                                It's in our hands
                                We are one

                                { One - Simple Plan}

   Il y a des choses, quand je rentre dans ma chambre, en Normandie, qui me frappent toujours. Cette accumulation de livres sans rangement, sans tri, dans laquelle se cotoient sans trop de raison La Bête Humaine de Zola, passablement abimé par ma lecture répétée du passage consacrée à Flore vers le milieu du livre, un livre de Ralph Blum dont je n'ai pas encore pu me débarrasser, deux tomes de Vassalord séparés par l'ABC des Runes et Salamandastron, et cela continue ainsi, classiques du XIXème, livres de folklore, d'ésotérisme, mangas et livres de fantastique se cotoient sans ordre autre que celui de "tient, il y a de la place ici, mettons ce livre là". Devant les livres, des tas de choses : ma plaque d'autel qui n'a pas retrouvé d'autel, pas encore, des tasses, des photos, des statues en résines, des animaux en tissus, des peluches. 

   Au fond, une bibliothèque, qu'est-ce ? Une accumulation d'univers, empilés les uns sur les autres, ou rangés côte à côte. Ouvrir La Fille aux Yeux d'Or de Balzac ne nous fait pas plonger dans le même univers que La Main d'Obéron de Zelazny (l'un des tomes de la première partie des Princes d'Ambre). Ouvrir du Ralph Blum, ce n'est pas non plus le même univers qu'une Doreen Virtue, malgré le fort new-agisme. Et je ne parle pas de la différence entre un ABC des Runes et Le Chevalier d'Eon de G.Melinand (que je devrais prendre le temps de lire, un jour).

   J'aime l'apparent désordre d'une bibliothèque, car une bibliothèque ne peut jamais être ordonnée, au fond. Comment ordonner quelque chose qui met ensemble tant de choses différentes ? Ils ont tous globalement la même apparence : une couverture, du papier, de l'encre. Mais leurs tailles, leurs couleurs, leurs noms, leurs histoires, ce qu'ils nous apprennent, tout cela est différent, tout cela ne peut pas s'accorder. On peut y trouver un ordre, mais il y aura toujours un désordre, car ce n'est pas parce que le B précède le C que tel livre se fera la suite de tel autre dans notre réflexion, ou qu'il s'en approchera. Les dos des couvertures colorées, même quand les livres viennent du même éditeur, jurent parfois, s'accordent d'autres, parfois n'ont strictement aucun effet. Et au final, malgré tout ce désordre, il y a quand même une harmonie. Celle de livres côte à côte, que l'on a pris du plaisir ou non à lire (quoi que le "ou non" signifie pour moi "troc ou Mémoranda" pour tout avouer^^), qui nous ont appris des choses.

   Et pourtant, j'ai remarqué que je ressentais un drôle de malaise quand je découvrais, dans un livre, un univers trop proche d'un autre, trop similaire. Je me rappelle de mon étonnement à la lecture d'Eragon, ma légère gêne par rapport à la lecture à cause de cette relation dragonnier / dragon trop proche, trop similaire de celle développé par MacCaffrey dans La Ballade de Pern, une de mes premières lectures en Science-Fantasy. Lire la Tapisserie de Fionavar m'aura fait le même genre d'effet par rapport aux Princes d'Ambre, malgré toutes les différences. Il y a une beauté dans toutes les originalités que les auteurs peuvent faire sur une même trame, même si parfois cela nous fait grincer des dents (Ralph Blum, les runes, groar). Il y a une beauté dans le fait de se faire se rencontrer sur le même coin d'étagère le Paris de Balzac et celui de Zola. "Ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre" (Verlaine, "Mon rêve familier" <3), ou que Pern rencontre les mythes nordiques. Les chocs des différences est l'un des plus beau qu'il soit sur les étagères ordonnées d'une bibliothèque.
 

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